WIESEL EN VINGT QUESTIONS

Rares sont les stand-uppers qui viennent tester leurs vannes sur notre lointain Caillou alors merci aux Mardis de l’Impro d’inviter cet orfèvre de l’humour suisse qu’est Thomas Wiesel pour 4 représentations exceptionnelles, du Nord au Sud en passant par l’Ouest et la Cité du Volcan.

Thomas, je sais que tu ne raffoles pas des calembours alors, pour te mettre en joie avant tes 12 heures de vol, voici ma première question : s’il reste deux places dans l’avion, tu choisis celle à côté de Nicolas Hublot ou l’autre près de la sortie de Zemmour ?

Je demande à m’installer dans le cockpit.

T’es plutôt aérophile, aérophage ou aérophobe ?

Aérophage malheureusement, désolé à mon voisin dans l’avion.

J’ai grandi sur les rives lémaniques et ce qui me manque le plus depuis que je vis à La Réunion, c’est le Ice Tea Migros et le Ragusa. En tournée, quel produit suisse ne quitte jamais tes valises ?

Mon sens de l’humour

Tu viens jouer sur notre île à l’initiative des Mardis de l’Impro, compagnie professionnelle d’improvisation théâtrale. L’impro ce sont des performances souvent très corporelles, physiques alors que l’interprétation, c’est pas vraiment ton rayon ?

J’ai une palette de jeu extrêmement large qui va de Thomas Wiesel fatigué à Thomas Wiesel circonspect.

Marina Rollman, Yann Marguet, Christine Gonzalez, Thomas Wiesel,… L’humour suisse a le vent en poupe mais est-ce que votre maître à tous restera à jamais Johann Schneider Ammann ?

Ça fait 5 ans qu’on lutte pour avoir ne serait-ce que le quart de la moitié du retentissement de ce sketch.

Tu aimes bien « envoyer des fions ». Pourrais-tu préciser le sens de cette belle expression helvétique ?

Je savais pas que c’était une expression suisse, mais dans mon cas, ça signifie balancer des vannes, je ne suis nullement dans l’import-export d’arrière-train.

Dans le même esprit, en stand-up, tu souhaiterais mieux faire connaître le roast. Explique-nous le concept.

Le roast, à la base, c’est un format d’humour anglo-saxon : une soirée d’hommage à une personnalité avec plein d’autres, humoristes pro ou non, qui se succèdent pour lui « balancer des fions » et la personnalité répond à la fin. Par extension, ça se dit parfois d’une salve de blagues incisives dirigées sur une personne.

Pourquoi cette forme de stand-up te parle particulièrement ?

C’est difficile de dire pourquoi on aime certaines choses, mais j’aime les prouesses de méchanceté que réalisent en quelques mots les Américains et les Anglais, en restant toujours drôles.

Je peux te présenter un charcutier très graveleux qui a inventé le roast-bifle. Avec qui aimerais-tu le tester ?

J’essaie de diminuer ma consommation de viande, et de bifles.

© Laura Gilli

Dans ton spectacle, il y a toujours une séquence où tu interagis avec le public en adaptant tes vannes au lieu dans lequel tu te produis. En quoi c’est important ?

Je fais pas toujours beaucoup de blagues personnalisées à chaque date, c’est beaucoup de travail et il m’arrive d’avoir pas assez de temps ou la flemme d’écrire (souvent plutôt la flemme).  Mais en tout cas discuter un peu avec le public, j’aime bien, ça permet de mettre tout le monde à l’aise (ou mal à l’aise, les soirs où je suis pas bon) et renforce le côté vivant et humain de la scène, qui nous ont beaucoup manqué après ces 2 années d’overdose de Netflix. Et comme le spectacle est presque le même tous les soirs, artistiquement, c’est stimulant d’avoir une partie inédite qui me motive et me force à rester concentré et à mon affaires.

À part ces blagues in situ, le cœur de ce show c’est plutôt toi avec tes lubies et tes phobies, non ?

C’était pour me concentrer sur le sujet que je connaissais le mieux, moi et mon nombril. Et même de réaliser que finalement j’ai encore beaucoup de choses à découvrir là-dessus.

C’est vrai que dans tes propos il y a énormément de sincérité et tu abordes des thèmes très intimes. Tu as donc choisi l’art pour te purifier?

Je sais pas s’il y a aussi un côté cathartique, en général quand je parviens à faire des blagues sur un sujet très personnel, ça fait du bien, mais ça veut aussi dire que j’ai déjà processé en grande partie. C’est dur de rire de quelque chose sans avoir un peu de recul.

Tu vas jusqu’à gloser sur ton infertilité. Est-ce que la réputation de nos rhums arrangés gingembre t’a conforté dans le choix de cette tournée ?

Ma copine ne peut pas m’accompagner sur ce voyage (et j’aime pas trop le gingembre, mais je goûterai !)

© Laura Gilli

Sur notre île, il y a une vraie culture de la raillerie (moukater en créole) principalement à l’oral. À l’écrit, ça passe beaucoup moins. Pourquoi selon toi ?

Être drôle à l’écrit est une gymnastique différente, on doit se passer du ton, du rythme, on laisse tout à la charge de la petite voix interne du lecteur : ça peut donner lieu à pas mal de mauvaises interprétations. L’oral permet de mieux cadrer.

Pour te donner un exemple, j’avais interviewé Guillaume Meurice qui avait eu le « malheur » de faire une blagounette sur les requins et ça avait créé une polémique débile. Quels sont les sujets clichés sur La Réunion dans lesquels tu promets de ne pas t’engouffrer ?

Je promets de ne pas parler de Guillaume Meurice, cet infâme collabo des requins !

À brûle-pourpoint, que connais-tu de notre île ?

Y a des volcans et des surfeurs. Et un endroit qui s’appelle Le Tampon.

Pour reposer ton cerveau en ébullition, tu adores faire des quiz en ligne et retenir une chiée de données qu’on pourrait qualifier de futiles, notamment sur le monde du football. C’est aussi impressionnant que flippant et je voudrais vérifier cette légende en te demandant de citer (sans tricher) 10 joueurs de foot réunionnais plus ou moins célèbres.

Nagatomo, Hasebe, Yoshida, Sakai, Higashiguchi, Osako, Ueda, Inui, Muto et Kagawa. Mais je confonds peut-être avec le Japon.

Mon diagnostic est sans appel : tu souffres d’hypermnésie. D’ailleurs, je suis persuadé qu’en lisant mes questions, tu as repéré quelle a été ma principale source pour préparer cette interview ?

Probablement « Un président ne devrait pas dire ça » de Gerard Davet et Fabrice Lhomme.

Perdu. Mon excellente source c’était Un bon moment avec Kyan Khojandi. Sans transition, j’ai un fils de 15 ans qui a des problèmes digestifs : s’il m’accompagne, ton stand-up aura-t-il des effets bénéfiques sur son transit et son éducation ?

Disons qu’il aura peut-être d’autres problèmes, après. 

Dernière question : c’est quoi ta définition du bon goût ?

C’est « Ça va » , en spectacle à La Réunion du 19 au 28 février. 

Réserve-vite tes places: