Petit traité de disculpation à l'usage des spectateurs amateurs

La dernière fois que je suis venu à Lespas, c’était pour voir Fantazio et son seul-en-scène abyssal. Cette fois-ci, ce fut une prestation collégiale loin loin loin d’être géniale. Cette adaptation du Petit Traité de Manipulation à l’usage des honnêtes gens mérite un papier tout petit et une occasion rêvée de me traiter.

Comme je suis heureux d’écrire dans un webzine suivi par 1400 personnes ne lisant mes bafouilles que si j’y joins une photo d’un cracheur de feu mono-couille ! Un lectorat sur lequel je n’ai aucune influence et j’en mesure ce soir ma chance….Jeudi, j’avoue avoir commis une belle Zerbinetterie. Chez les cultureux de Bongou, une Zerbinetterie consiste par exemple à confondre Guillaume Meurice (le chroniqueur) avec Jean-Christophe Meurisse (metteur en scène des Chiens de Navarre), accepter une interview de Cali en pensant que c’est un conteur et l’appeler Kalou ou encore comparer Vaudou Game à du maloya alors qu’on est en train d’écouter sa première partie, Saya.

Hier soir, me voilà donc à Saint Paul pour cette pièce ; une adaptation d’un best-seller de psychologie sociale que j’avais trouvé fort éclairant. Par conséquent, ce choix de programmation en période pré-électorale me semblait plutôt engageant. D’autant qu’à la distribution, je croyais y repérer ce grand acteur qu’est Jean-Claude Dreyfus, que les commentaires en ligne étaient plutôt dithyrambiques et que les deux représentations affichaient vite complet. Est-ce mon excitation qui m’a conduit à cette auto-manipulation ? Toujours est-il que cette distribution existe bien mais pour une pièce datant de 2007 (!cf. visuel ci-dessous) et que l’acteur sur les photos de présentation ressemble autant au charismatique Dreyfus que l’Affaire Balkany s’apparente à l’Affaire Dreyfus… Comme c’est ma consœur Zerbinette qui est affectée au service fact checking, autant vous dire que personne n’a été interpellé par ce farfelu name dropping.

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Hier soir, il m’a fallu seulement trois répliques d’acteurs pour comprendre mon erreur, évaluer mon malheur et cet enfer allait durer une heure. J’aurais tellement aimé écrire que cette pièce devrait être vue par tous les futurs électeurs pour se méfier de nos politiciens bonimenteurs. Malheureusement, ce théâtre amateur n’était pas à la hauteur du labeur : interprétations très peu inspirées, accents grossiers et désuets (Freud et son accent allemand pas marrant, pas pire que celui de Shakespeare, Molière dont on capte pas les vers,…), musiques convenues (entrée du Diable sur Highway To Hell, La Salsa du Démon pour un final super original), une séquence de comédie musicale ayant le mérite de proposer un tour de chant aussi désolant que sa chorégraphie de manchots claudicants,… J’arrête ici mon inventaire du mec un peu vert car je sens que je vais tomber dans le « bête et méchant ».  Penchant que j’assume tellement quand il s’agit de railler nos dirigeants, surtout quand ils baissent les subventions dédiées aux associations culturelles de 73%. Vous l’avez compris, Bongou est aussi admirateur de théâtre amateur que d’élus imposteurs. Hier soir, si un malheureux spectateur était présent à cause de ma recommandation, je suis prêt à lui offrir ma procuration aux prochaines élections.

Sinon, vivement que je revienne à Lespas, revoir des performances d’acteurs comme celle de Fantazio, histoire de pouvoir réécrire des choses sympas comme « (…) la maîtrise des rythmes comiques, des mimiques, des imitations hystériques ou des déplacements métronomiques est toujours dynamique. »

P.-S. La représentation de ce soir (vendredi 14 février) est complète. Pour être positif, le seul élément réconfortant de ma soirée fut de me dire que, contrairement à une bonne partie du public, je n’étais pas ami avec un des onze acteurs au plateau, m’évitant de la sorte tout éloge hypocrite.

Manzi