Sacha Guitry disait : « Le mariage c’est résoudre à deux les problèmes qu’on n’aurait pas eus tout seul ». Comme Bongou adore s’attirer des problèmes, il a demandé à une spectatrice enjouée de venir controverser sur le spectacle Tousèl. Manzi bougon + Nelly dans tous les bons coups = le retour de la battle Bongou.
© Photo: Lilly Jacquety
SOIS FORT: DÉCRIS LE DÉCOR
Nelly : Une cabine téléphonique et un carrousel XXL avec deux vitres ; un autre représentant tantôt une table de repas dressée pour 2, tantôt l'espace douche, nous plongent dans l'intimité d'un homme qui essaie de déjouer sa solitude.
Manzi : J’ajouterai que ce décor manque de cohésion avec cette cabine centrale en ferronnerie ambiance steam-punk, servant d’agrès-refuge au magicien-circassien et, de part et d’autre, deux pans de murs en toile beaucoup plus pop, permettant l’apparition d’ombres chinoises. Alors, oui on est dans l’antre d’un clochard céleste qui se contrefout du feng shui mais, visuellement, c’est un peu cheap. J’aurais préféré un assemblage foutraque d’objets de récup’ même si cet univers visuel a également été mille fois utilisé dans l’esthétique du théâtre forain. Heureusement, les éclairages uniformisent ce triptyque scénique.
Nelly : Cheap ? À l'heure de la montée en conscience sur l'écologie et d'une inflation galopante, on salue au contraire la capacité à créer cet univers à partir de peu de choses. Cette frugalité se marie de surcroît parfaitement avec la solitude.
Manzi : Je t’enverrai la facture de la structure en acier et je te chargerai de la recycler dans ton tiers-lieu. Le plus tard possible hein car j’ai quand même envie que ce spectacle joue plein de fois.
© Photo: Lilly Jacquety
PASSE L'HISTOIRE À LA PASSOIRE
Nelly : C'est l'histoire d'un mec. Un mec tristement seul, qui attend invariablement un appel dans une cabine téléphonique, son pré-carré dont il prend grand soin. Histoire d'être prêt quand l'appel arrivera. Histoire de se donner toutes les chances que cet appel arrive. C'est l'histoire d'un mec qui cherche l'amour ou, à tout le moins, quelqu'une pour vivre à ses côtés une vie douce dont on suppute qu'elle pourrait être drôle et pleine de facéties grâce à la magie, autre qualité du comédien et dont les tours qu'offre le spectacle ravissent petits et grands.
Manzi : J’avais vu une étape de travail de la compagnie Zopiok pour ce solo qui se voulait plus une réflexion sur la solitude de ces vagabonds et un éloge onirique de la lenteur. En voulant aborder cette thématique, le spectateur s’ennuyait sévère devant la mollesse des saynètes, malgré les percées magiques. Romuald Solesse a eu raison de changer de braquet et l’enchaînement des numéros ne nuit pas au propos. Je maintiens que cet anti-héros doit encore trouver le bon tempo sur certains tableaux.
© Photo: Lilly Jacquety
CE QUI T'A MARQUÉ SANS T'ÉTALER
Nelly : Il y a de la tendresse dans ce spectacle et dans la quête de cet homme. J'ai apprécié la danse des parapluies façon "Singing in the rain", adoré la version de la chanson "Lemon inceste". Snif, on ne peut pas shazamer au spectacle !
Manzi : Manquerait plus que tu scrolles vu comment tu tchatches avant et après la représentation ! Je plussoie pour la danse des parapluies, avec les yeux de la mouche particulièrement bien incarnés. Si les tours de magie proposés n’ont rien de nouveau, ils sont réalisés avec brio et les applaudissements entre les différents moments sont la preuve que le public est sous le charme. Sur notre île, c’est pas tous les soirs qu’on peut s’offrir ces instants de magie sans que le prestidigitateur nous bassine avec sa logorrhée de bazardier.
© Photo: Lilly Jacquety
T'AS AIMÉ OU PAS ? SOIS FRANC OU TAIS-TOI
Nelly : Oui, j'ai aimé ! Ce n'est pas le spectacle de toute une vie mais ça ne se veut pas plein de prétention non plus comme d'autres qui n'atteignent, pour autant pas leurs promesses. Je vous renvoie ici au papier de Bongou sur Leu Tempo 2025 dont je valide le classement
Manzi : Je t’avais dit que j’abordais cette représentation avec une dose de scepticisme. C’est d’ailleurs un état émotionnel que je m’impose souvent avant de sortir, histoire d’augmenter les chances d’ « être déçu en bien », comme disent les Suisses. Ce fut le cas ce vendredi 13 juin au K et il est toujours gratifiant de voir comment un spectacle peut évoluer positivement et trouver son public. Je recommande donc ce spectacle familial qui rejoue le vendredi 20 juin à la Cité des Arts.