Vagabundus, une performance qui pulse

Je ne vais pas vous asséner la théorie du verre à moitié vide qui, ouais-ouais quand même, mais là, hier soir la demi-salle vide de spectateurs à Champ-Fleuri – oui, je sais que les profs avaient des conseils de classe et qu’il y avait L’inspecteur Barnaby sur C8 - mais bon, rater Vagabundus de la compagnie mozambicaine Converge+ d’Idio Chichava (non, je ne me moque pas des Auvergnats, c’est son vrai nom !), ben je ne sais quoi vous dire, mais en tout cas, nous, la moitié pleine on a été secoués du début à la fin par la beauté et la puissance de ce spectacle chorégraphique total, programmé dans le cadre du festival Souffle o.I. #4

Total parce que très épuré, pas de musique d’accompagnement enregistrée pour régler les pas, pas vraiment de décors, ni de costumes, pas de bla-bla psychodramatique sur le corps-marchandise ou sur la prise de conscience du corps sexo-woké, pour laisser la place à la mise en scène et en espace d’une seule vibration collective et continue des corps dansants et chantants en même temps. Vagabundus c’est d’abord une vague d’énergie corporelle sonore et chorégraphique qui déferle sur nous pendant plus d’une heure.

© FESTIVAL KINANI

Ce sont des danseurs qui surfent sur la vibration de leurs propres voix en chœur, en formant des ensembles, ou qui s’en détachent parfois pour tenter un chemin de traverse. Des vibrations du corps qui tout en exprimant leur fragilité, permettent d’entrer en phase avec les autres pour former une vague. Parce que Vagabundus, qui signifie le vagabond dans la langue de César, c’est une très belle mise en scène de la condition errante du migrant qui cherche son chemin en se déplaçant sans possibilité de retour en arrière, souvent avec un groupe de fortune, ou parfois en s’en détachant pour retrouver quelques instants d’individualité.

© FESTIVAL KINANI

Enfin, Vagabundus c’est aussi la beauté pure des formes esthétiques dans la philosophie de Kant. Autant pour nous de rappeler que si la compagnie Convergence+ est formée de 5 danseurs et 4 danseuses traditionnels mozambicains, l’approche contemporaine des traditions a permis à leur chorégraphe passé par l’Europe de rendre plus libre et universelle le poids de celles-ci. Les danses mozambicaines étant encore peu connues du grand public français, on pouvait cependant reconnaitre dans ce ballet les marques de la géographie du Sud-est africain et Océan indien par les rythmes rappelant le gumboot d’Afrique du Sud, les sauts des Masaï du Nord, et bien-sûr, ici en l’R ceux du maloya. Un dernier mot : magnifique !

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